Lancé en mars 2015, le « plan justice » du ministre Koen Geens est sans doute la plus ambitieuse réforme de ce secteur clé depuis la création de l’État belge. Son but annoncé est de moderniser et rendre plus efficace un mastodonte qui compte 22.000 membres, dont 2.500 magistrats, et dispose d’un budget propre de 1,7 milliard d’euros.
Le projet se décline en 5 bouquets de lois, bizarrement appelés « pot-pourris »… qui, depuis plus d’un an et demi, sont lancés à intervalles réguliers.
Pot-pourri I (octobre 2015): adaptation de la procédure civile et de l’organisation judiciaire, réforme des procédures civiles, y compris les frais de justice et les technologies de l’information;
Pot-pourri II (février 2016): modification du droit pénal et de la procédure pénale;
Pot-pourri III (mai 2016): adaptation du cadre légal de l’internement. Création de « Chambres d’internement » en remplacement des Chambres de défense sociale. Ciblage plus précis de l’internement. Simplification et accélération des procédures;
Pot-pourri IV (novembre 2016): modification du statut des détenus et de la surveillance des prisons. Création d’un Registre central des règlements collectifs de dettes. Protection de l’identité des membres des membres des services de police.
Pot-pourri V (feu vert du gouvernement en juillet 2016): concerne principalement des dispositions de droit civil, de la procédure civile ainsi que du notariat.
Selon le ministre Geens, qui avance crânement avec une détermination sans faille, ce plan très ambitieux a pour objectif de remettre en ordre l’ensemble du système judiciaire belge. Comme tout bon général, le ministre entend marcher vite et selon un plan soigneusement minuté. Il a assuré ses arrières en consultant des dizaines d’experts et, pour reprendre ses mots, « d’innombrables acteurs de la justice ».
Tout cela pourrait forcer le respect. Mais comment expliquer, alors, que d’autres « innombrables acteurs de la justice » et d’experts de tout poil soient aussi amèrement critiques à l’égard de la pluie de « pots-pourris » qui tombe dru depuis l’automne 2015? Malentendus ? Calculs politiques? Mouvements d’humeur? Résistance au changement? Ou réels problèmes avérés et mauvaises surprises à prévoir?