Espace de libertés | Novembre 2020 (n° 493)

Vade-mecum pour résister à la censure


Des idées et des mots

De nos jours, les tentatives de censure ne sont plus le fait d’un État moralisateur ; elles émanent très souvent de mouvements d’extrême droite, religieux et réactionnaires, mais paradoxalement aussi d’associations progressistes militantes. Les modes opératoires ont évolué et se sont diversifiés, notamment depuis l’avènement des médias sociaux. Aux classiques procès et manifestations s’ajoutent dorénavant pétitions, intimidations et appels au boycott incitant des artistes à l’autocensure. Posant le constat que la liberté des artistes est de plus en plus malmenée, la Ligue des droits de l’homme française a pris l’initiative de créer, en 2002, un Observatoire de la liberté de création en vue de lutter le plus efficacement possible contre la censure des œuvres et d’intervenir en soutien aux artistes y étant confrontés. « Tous les motifs sont invoqués par les censeurs : blasphème, protection de l’enfance, des femmes, lutte contre le racisme… », explique l’Observatoire. « Or, si le débat est sain, la censure n’est pas acceptable. » L’ouvrage qui nous occupe analyse de manière détaillée treize cas emblématiques de situations de censure répertoriées depuis vingt ans dans différents domaines artistiques. Épinglons, à titre d’exemples, le cas de « censure préventive » subie, dans le contexte des attentats contre Charlie Hebdo, par l’artiste Mounir Fatmi. Ou encore les accusations de blasphème et de christianophobie portées à l’encontre des metteurs en scène de théâtre Romeo Castellucci et Rodrigo García. Chaque affaire y est présentée selon un plan similaire fournissant au lecteur une description de l’œuvre contestée, d’abondantes informations sur le contexte politique et social, mais aussi sur la recevabilité juridique des actions menées à l’encontre des artistes. Une chronologie et une bibliographie complètent chaque cas. Rédigé de manière didactique, ce guide constitue un outil éclairant pour mieux appréhender ce qui, in fine, relève ou non de la censure. (ac)