Si la neutralité de l’État est reconnue comme un principe constitutionnel, l’actualité démontre que son application concrète n’est pas toujours sans poser question. Dans un État de droit, le respect de la loi avant les obligations religieuses et l’indépendance réciproque entre État et institutions religieuses doivent être reconnus et formalisés afin de garantir le vivre-ensemble et l’égalité entre les citoyens.
L’inscription du principe de laïcité dans la Constitution : une revendication historique du mouvement laïque
Dans cette perspective, le Centre d’Action Laïque plaide de manière historique pour l’inscription du principe de laïcité dans la Constitution. En effet, ce principe permet de défendre et de promouvoir un socle commun de valeurs fondé sur les libertés fondamentales et de lutter contre toutes les formes de communautarisme, de repli identitaire voire d’extrémisme violent.
Cette revendication du mouvement laïque a été réitérée à l’occasion de sa Convention l’année dernière et figure parmi les priorités inscrites dans le mémorandum du Centre d’Action Laïque pour les élections 2024.
Pour faire le point sur ces questions et nourrir le débat en cette matière, les partis politiques francophones ont été invités à l’occasion du dernier Midi PIL de cette année 2023 le jeudi 14 décembre. Autour de la table, cinq partis étaient représentés (le PTB n’ayant donné aucune suite à notre invitation) :
- Daniel Bacquelaine, député fédéral MR
- François De Smet, député fédéral DéFI
- Christophe Lacroix, député fédéral PS
- Ismaël Nuino, représentant Les Engagés
- John Pitseys, député bruxellois Ecolo
Les échanges, parfois vifs, mais toujours enrichissants, ont pu mettre en lumière le caractère polysémique des notions de laïcité, d’impartialité et de neutralité et les interactions existantes entre ces concepts.
Les partis qui ont déposé une proposition de révision ou une proposition de déclaration de révision de la Constitution ont eu l’occasion d’exposer les principes de leur texte : le PS, avec sa proposition « visant à renforcer la primauté du droit positif sur toute prescription religieuse ou philosophique, à mieux garantir les droits de l’homme, les libertés fondamentales et l’égalité des femmes et des hommes et à consacrer la laïcité de l’État belge », le MR avec sa proposition d’« insérer un nouvel article 10/1 établissant la neutralité de l’État et l’impartialité de son action » dans la Constitution et enfin, la tentative de DéFI de faire inscrire le principe de laïcité dans la Constitution sous cette législature (sur base de l’article 7bis, actuellement ouvert à révision).
Laïcité dans la Constitution : plus qu’une mesure symbolique
Ce sujet a permis aux représentants politiques d’aborder différentes thématiques : l’interdiction des signes convictionnels dans la fonction publique et l’enseignement obligatoire (faisant l’écho de la position de leur parti respectif en cette matière), l’extension du cours de philosophie et de citoyenneté, le financement des cultes et des associations non confessionnelles reconnus, etc. Cette circonstance démontre que l’inscription du principe de laïcité dans la Constitution ne devrait pas et ne pourrait pas être une mesure uniquement symbolique : celle-ci aurait nécessairement des répercussions dans de nombreux aspects de la société. Pour le Centre d’Action Laïque, ces conséquences serviront nécessairement à une meilleure protection des droits fondamentaux, en ce compris les libertés de conviction et de religion, mais aussi à une promotion du vivre-ensemble fondé sur des valeurs communes.