Cartes Blanches

La loi sur l’avortement face aux discours totalitaires

La loi sur l’avortement face aux discours totalitaires

L’évolution de nos sociétés oppose généralement deux tendances forcément antagonistes: les progressistes et les conservateurs. L’aile ultra des conservateurs se montre aujourd’hui prête à tout pour revenir sur des progrès qu’elle estime contraires à des valeurs du passé, présentées comme respectueuses de « la vie ».

En ce qui concerne la loi sur l’avortement, de quelles vies s’agit-il ?

Toutes les 8 minutes une femme meurt dans le monde des suites d’un avortement non médicalisé.

Votée dans les circonstances que l’on sait il y a 22 ans, cette loi permet sous certaines conditions un recours à l’avortement, encadré par des équipes médicales et psychologiques dûment formées et reconnues par l’Etat. C’est le fruit d’une longue lutte progressiste et solidaire pour la liberté de chacun, et des femmes en particulier. Cette dépénalisation d’un acte médical évalué par une commission officielle, permet aux femmes de gérer en conscience leur vie et leurs grossesses. Enjeu majeur de santé publique, cet acquis en faveur de l’émancipation et du libre choix des femmes et des couples est de plus en plus fréquemment remis en cause par des militants anti-avortement qui agitent le spectre d’une « banalisation ». Mais s’inquiètent-ils de savoir ce qui se passerait si l’avortement redevenait interdit? En Europe, il l’est en Pologne, Irlande, Malte et Chypre. Les femmes de ces pays qui n’ont pas les moyens financiers pour se rendre à l’étranger avortent alors clandestinement. Comme c’est le cas en Afrique ou en Amérique du sud. Les conséquences sont terrifiantes: séquelles physiques souvent irréversibles, quand ce n’est pas la mort de la femme elle-même, qui la plupart du temps est déjà mère de plusieurs enfants! Toutes les 8 minutes une femme meurt dans le monde des suites d’un avortement non médicalisé. Des millions sont mutilées à vie. Pour ceux qui se proclament « pour la vie », la vie de ces mères pèse bien peu dans la balance!

Objection de conscience

Il ne faut pas croire qu’en Belgique l’accès à l’avortement est garanti à jamais. Si les médecins ont le droit de refuser de le pratiquer pour des raisons « de conscience », ils ont aussi l’obligation d’adresser leur patiente à un confrère qui se conformera aux conditions prévues par la loi. Encore faut-il que le premier médecin n’ait pas fait traîner les choses afin que la grossesse dépasse les 12 semaines légales… Cette mainmise de plus en plus fréquente vise à entraver la liberté des femmes de devenir mère quand et avec qui elles le décident. Elle rappelle les tristes heures où l’on sacrifiait leur vie pour sauver l’héritier en cas de problème à l’accouchement. Qu’importe qu’elle eût été violée, abandonnée, mal informée ou qu’elle ne soit pas physiquement apte à porter un enfant  ou encore matériellement capable de l’élever dans de bonnes conditions: pour ces adversaires de la loi de 1990, pas question d’avorter, quitte à briser deux vies définitivement!

Nous ne sommes pas « pour » l’avortement . Nous sommes pour le choix.

Les progressistes signataires de ce texte lancent un cri d’alarme face aux tentatives des ultra-conservateurs pour faire basculer la loi vers une régression sociale et médicale. Nous nous rassemblons aujourd’hui dans une plateforme pluraliste pour faire valoir un droit humain fondamental: choisir sa vie, et non la subir!

Nous appelons ceux qui veulent réaffirmer que la loi belge de 1990 dépénalisant partiellement l’avortement est un acquis inaliénable, à se mobiliser pour faire échec aux rétrogrades qui veulent imposer leur idéologie à ceux et celles qui ne pensent pas comme eux. L’ONU et l’OMS se sont prononcées pour que l’avortement médicalisé soit possible partout dans le monde. Il serait impensable que chez nous certains s’arrogent le droit d’interdire à toutes ce recours, alors que la loi sur l’avortement le permet sous certaines conditions, mais ne l’impose à personne! Les « croisés du droit à la vie » qui nous taxent de « marchands de mort » assimilent le progrès humain à l’œuvre du diable. Ces discours totalisants sont d’un autre âge! Après l’avortement, remettront-ils ensuite en cause le droit à la contraception? Nous ne sommes pas « pour » l’avortement . Nous sommes pour le choix. Nous estimons les êtres humains – et les femmes en particulier – suffisamment intelligents et responsables pour décider de fonder une famille quand c’est possible pour eux.

Le combat pour la liberté continue.  Nous revendiquons avec force, et sans ambigüité, l’émancipation des citoyen-ne-s, le droit de gérer son corps et sa vie, le libre choix et la planification familiale volontaire,  la responsabilité individuelle et celle du couple, l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes, le respect de l’intégrité physique et psychique de chacun, la liberté sexuelle et le droit au plaisir. Et nous appelons toutes celles et ceux qui approuvent le sens de ce texte à signer la charte sur le site www.abortion.eu et à nous rejoindre lors de la manifestation organisée en soutien à la Loi Lallemand-Michielsens, le 24 mars à 14h devant le Palais de Justice de Bruxelles.

CAL – Centre d’Action Laïque, Centre du Libre Examen, Centre Séverine, Comité belge Ni putes Ni Soumises asbl, Conseil des Femmes Francophones de Belgique, deMens.nu – Unie Vrijzinnige Verenigingen vzw, Fédération des Centres de Planning et de Consultations, Fédération des Centres de Planning Familial de FPS, Fédération des Centres Pluralistes de Planning Familial, Fédération laïque de centres de Planning familial, FGTB/ABVV, Garance, GACEHPA, La Mutualité Socialiste – Solidaris , La Ligue des Droits de l’Homme, R.A.P.P.E.L (fr/nl), Université des femmes, -VIVA- Socialistische Vrouwen Vereniging, Vrijzinnige Vrouwen Oost-Vlaanderen, signataires de la charte et membres de la plateforme pour le droit à l’avortement (www.abortionright.eu)

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