Philosophe belge, Chantal Mouffe est professeure au département de Sciences politiques et des relations internationales de l’Université de Westminster à Londres. Ses nombreux ouvrages et articles de philosophie politique relatifs au fonctionnement et aux failles de nos démocraties occidentales ont inspiré des partis politiques comme La France insoumise, Syriza en Grèce ou Podemos en Espagne. En s’attardant sur le populisme, Chantal Mouffe casse les codes en connotant positivement ce terme. Selon elle, il s’agit tout d’abord d’une stratégie politique et discursive, et non d’un régime politique en soi. Basée sur un sentiment d’exclusion du pouvoir, cette stratégie touche aussi bien des sensibilités de droite que de gauche. La crise financière de 2008 a mis en évidence les limites du néo-libéralisme entraînant une oligarchisation de nos sociétés : le pouvoir est réservé à un petit groupe de personnes qui forment une classe dominante et qui ne rend plus de compte au peuple. En opposition, de nouveaux mouvements sociaux sont nés portant des revendications très fortes mais souvent disparates et non institutionnalisées (les luttes antiracistes, écologistes, féministes, LGBTQI+, zadistes, etc.). Selon elle, l’échec des partis sociodémocrates et de gauche de ces dernières années résulte de la non-prise en compte de ces revendications populaires qui dépassent la grille de lecteur classique de la lutte de classes sociales. C’est ce que la philosophe belge appelle le « moment populiste ». Elle lance donc un appel aux partis de gauche qui, n’ayant pas pris en compte ces revendications populaires, ont laissé le champ libre à la droite et à l’extrême droite. Pour l’auteure, il faut fédérer les mouvements et les luttes autour de valeurs communes. Avec une approche parfois iconoclaste, Chantal Mouffe insuffle un vent nouveau, résolument ancré dans des valeurs portées par la laïcité, à savoir la solidarité, l’égalité, la liberté et la justice sociale. (jp)
Des idées et des mots