Espace de libertés | Novembre 2019 (n° 483)

« Un manque criant de préparation à la sortie »


Opinion

« Après la prison, toujours la prison ? » : tel est le thème des journées nationales consacrées à l’univers cacéral cette année. Mélanie Bertrand, membre de la Concertation des associations actives en prison (CAAP), nous en explique les enjeux.


« De manière générale, l’épreuve de l’incarcération a un impact certain sur l’identité des personnes qui retrouvent la “liberté”. À la sortie, l’étiquette de détenus leur est apposée dans de nombreuses situations, dégradant fortement l’estime de soi. À côté de ces stigmates “symboliques”, l’enfermement fragilise fortement l’individu dans sa reconstruction sur des plans plus concrets tels que le maintien des liens avec ses proches, la recherche d’un habitat, le recouvrement des droits sociaux, etc. La prison accentue la précarité dans laquelle se trouve une grande partie des personnes détenues. La notion de “liberté” est donc toute relative. Les journées nationales de la prison constituent donc un outil de sensibilisation sur le quotidien derrière les barreaux et l’effet pervers de l’incarcération en termes de réinsertion. En Belgique, le taux de récidive suite à un emprisonnement est notamment assez élevé, au-delà de 50 %, soit plus d’une personne sur deux qui commet un acte délictueux peu de temps après la sortie. Cela en dit long sur les échecs du politique. Il y a un manque criant de préparation. Lors de l’incarcération, les services de formation à l’enseignement censés être organisés pour aider la personne à trouver une place dans la société lors de sa sortie sont souvent défaillants. Après la libération, accéder à une structure “relais” constitue un tremplin pour l’insertion. Cependant, les personnes parviennent difficilement à intégrer ces structures ; et ce, pour diverses raisons : la méconnaissance voire la crainte à l’égard de ces personnes, des conditions d’accès qui ne sont pas toujours adaptées ou l’engorgement de ces structures.  Il faut donc questionner cette politique de la prison : n’y a-t-il pas autre chose à mettre en place pour rééduquer ? Le but de ces journées nationales est aussi d’aborder les peines alternatives ; celles qui existent, comme la surveillance électronique ou la libération conditionnelle et celles qui pourraient être créées. La première semaine des journées internationales, une exposition collective sera organisée dans l’espace La Vallée à Molenbeek, mais aussi des soirées thématiques, des animations pédagogiques  autour de la prison, accessibles à tout le monde. Un espace sera également occupé par les étudiants de l’IHECS qui présenteront leur projet de mémoire médiatique dénommé : « Mirador, un regard citoyen sur la prison ». La deuxième semaine se déroulera à Namur, avec une nouvelle exposition et la présence du Mirador. Nous organiserons également des soirées « in-out » : l’idée c’est de faire jouer un artiste en prison et à l’extérieur le même jour ». (cw)