Espace de libertés | Octobre 2019 (n° 482)

Coup de pholie

Je suppose que vous n’avez jamais entendu parler de Dusarès. Normal, il fait partie de ces innombrables dieux adorés un jour et oubliés le lendemain. Tel n’est-il d’ailleurs pas le sort de toute divinité ? Il y a plus de deux mille ans, Dusarès était vénéré par les Nabatéens, ces Arabes de l’ère préislamique qui taillèrent de magnifiques temples dans la roche de Pétra en Jordanie. On les découvre au sortir d’un étroit défilé qui serpente vers l’épiphanie lithique. Ces tribus reconnaissaient en Dusarès un dieu de la montagne et le représentaient sous forme d’un bétyle sans doute quelque peu phallique. Un détour par l’étymologie s’impose. Ne nous attardons pas sur l’adjectif phallique – très qualificatif, il faut le reconnaître au passage. Cependant, il n’est peut-être pas inutile de mentionner que pétra signifie en grec « rocher », comme le savent tous les pétrologues. Quant au bétyle, il n’est autre qu’une idole de pierre qui abrite une divinité très ancienne, une authentique « maison de Dieu », beth-el en hébreu. Beth comme dans Bethléem (maison du pain) ou dans bêta (maison). El comme dans Babel (porte de Dieu) ou dans Allah.