Quatre ans après les attentats de Charlie Hebdo, où en sommes-nous ? Zineb El Rhazoui, ancienne journaliste du magazine satirique, militante des droits humains, nous livre son point de vue.
« Nous sommes dans une Europe où les attentats se sont multipliés. On a compté des centaines des cadavres, y compris des cadavres d’enfants. Nice, le Bataclan, le Stade de France, Bruxelles, Londres… et ainsi de suite. Voici où nous en sommes. Nous sommes dans une Europe, dans un monde, où plus personne n’osera jamais dessiner le Prophète. Donc, la liberté d’expression a reculé. Nous sommes dans une Europe où des dizaines – probablement plus – d’événements culturels sont déprogrammés ou, peut-être, tués dans l’œuf. Pour des raisons de sécurité.
J’ai envie de dire que, si certains d’entre nous risquent aujourd’hui leur vie pour défendre la liberté de tous, il faudrait que tous se joignent à ce combat-là. Parce qu’en se taisant, ils mettent encore plus en danger ceux qui parlent. Aujourd’hui, certains comme moi ont pris des risques pour dénoncer la montée de cet islam de plus en plus militant, de plus en plus revendicatif, avec un bras armé qui tue.
Je suis menacée de mort pour avoir fait ça. Mais il y a aussi eu des victimes qui sont mortes juste parce qu’elles buvaient un verre en terrasse, juste parce qu’elles avaient pris le métro à Bruxelles au mauvais moment, juste parce qu’elles sont allées voir un match de foot, juste parce qu’elles étaient dans leur poussette pour voir les feux d’artifice à Nice.
Tout le monde est en danger. Cette anxiété est la chose la plus partagée aujourd’hui. Mais il n’y a pas que l’anxiété et la peur du terrorisme. Il y a aussi la peur de voir changer la société. Certains quartiers aujourd’hui sont véritablement des territoires perdus pour la mixité, pour la démocratie, pour la liberté, pour les femmes. On ne compte plus les cafés où les femmes ne peuvent plus s’asseoir. On ne compte plus les quartiers où les femmes ne peuvent plus s’habiller comme elles veulent. On ne compte plus les actes antisémites, les actes d’exclusion. Il faut qu’on se réveille, qu’on se ressaisisse de nos libertés avant qu’il ne soit tard. »