Espace de libertés | Novembre 2018 (n° 473)

L’accueil familial : un plus pour les réfugiés


Opinion

Le 19 octobre dernier, la Plateforme citoyenne d’aide aux réfugiés a reçu le prix Henri La Fontaine pour l’Humanisme. Mehdi Kassou, son porte-parole, réagit.

« C’est très honorifique de recevoir un prix international, surtout au vu des autres candidats, et sous la présidence de Mokhtar Trifi, qui est aussi président honoraire de la Ligue tunisienne des droits de l’homme. Il s’agit aussi d’une reconnaissance nationale en quelque sorte puisque la remise du prix a eu lieu au Sénat, ce qui signifie beaucoup pour nous. Cela nous pousse à poursuivre nos actions, avec une priorité qui est celle de renforcer l’accompagnement des familles d’accueil. Il s’agissait au départ d’un accueil d’urgence pour deux ou trois jours, alors qu’aujourd’hui, les familles deviennent d’une certaine manière des marraines, en accompagnant les réfugiés dans leurs procédures juridiques, sociales, en les aidant à faire respecter leurs droits. Cela, en collaboration avec les autres partenaires, je pense par exemple à Médecins du Monde, avec lesquels nous avons lancé voici un an le hub humanitaire. Aujourd’hui, à défaut de réponse institutionnelle structurelle, nous essayons de modéliser ce hub et son orientation de services d’aide.

Brussels, Belgium: Poster during the demonstration in support of the refugees where it is written "we are not sheep". Eleven associations including Doctors of the World Belgium, Anti-Capitalist Youth or the Citizen's Refugee Support Platform in Brussels, organized a demonstration in support of refugees from Belgium, the 25th February 2018. Bruxelles, Belgique: Poster lors de la manifestation en soutien aux réfugiés où il est écrit "nous ne sommes pas des moutons". Onze associations dont Médecins du Monde Belgique, Jeunesse anticapitaliste ou la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés de Bruxelles, ont organisé une manifestation en soutien aux réfugiés de Belgique ,le 25 janvier 2018.© Virginie Nguyen Hoang/Hans Lucas/AFP

Il y a une dizaine de jours, la France a voté un amendement qui permet de payer moins d’impôts lorsque l’on accueille des réfugiés. C’est l’une des propositions contenues dans le livre Au-delà des frontières. Je pense que le citoyen ne doit pas devenir l’outil qui pallierait les manquements du gouvernement. Mais au-delà de l’accueil dans l’urgence, ce qui fonctionne le mieux et qui pourrait à mon avis le plus faire changer notre société, ce serait d’institutionnaliser cet accueil des citoyens selon une vision sociétale inclusive. Et là, je parle en tant que petit-fils d’immigré. Ces 40 dernières années, nous avons été dans une optique de société d’intégration, mais avec une mécanique unilatérale. La réponse citoyenne pourrait modifier la donne, car l’accueil des réfugiés par les familles les aide à développer leur réseau social beaucoup plus rapidement. Je vais donner un cas concret : lorsque l’on compare les personnes accueillies en 2015 – principalement des Syriens, des Afghans, des Irakiens – qui ont bénéficié de ces mécaniques d’intégration via les familles, avec les réfugiés accueillis aujourd’hui et qui ont stagné dans les centres Fedasil avant d’obtenir leur statut, la différence est incroyable. Nous sommes face à des gens qui parlent l’une des langues du pays, parfois deux, qui ont un travail, une famille. Alors que les autres commencent à peine à parler nos langues, qu’ils n’ont pas de réseau social et reviennent vers nous afin d’obtenir un coup de main pour introduire leur demande au CPAS, chercher un logement… La différence est vraiment frappante ! De la même manière que l’on a structuré l’accueil des mineurs dans les familles, je pense que l’on pourrait le généraliser. »