Espace de libertés | Octobre 2020 (n° 492)

Les nouveaux défis de l’État social


Des idées et des mots

Pandémie, crise écologique, racisme et violences policières, qu’est-ce qui ne marche pas aujourd’hui dans nos civilisations ? En quoi les événements que nous vivons actuellement impliquent-ils l’État social ? Édouard Delruelle, professeur de philosophie politique à l’’Université de Liège, intellectuel engagé dans des combats citoyens et président de l’Union nationale des mutualités socialistes, répond à ces questions en comblant un manque : penser philosophiquement l’État social. Selon lui, les courants dominants de la philosophie politique – le libéralisme, le marxisme, le poststructuralisme – n’ont jamais pu saisir le sens politique de l’État social qui, au sein de la société capitaliste, a réussi à arracher aux forces du marché l’essentiel de ce qui conditionne le bien-être des individus. Pourtant, aujourd’hui, on assiste bel et bien au démantèlement des trois leviers de l’État – la Sécurité sociale, les services publics et le droit du travail – ce qui, pour l’auteur, témoigne d’une crise de civilisation menaçant désormais nos fondamentaux. Mais quelle est la nature de cette violence « décivilisatrice » propre au capitalisme néolibéral ? Quelles stratégies de civilité et de dissensus lui opposer ? Faut-il réfléchir à un nouveau Pacte social et écologique ? Avec clarté et talent, Édouard Delruelle nous démontre toute l’actualité de l’État social. Il en veut pour preuve les trois grands défis civilisationnels du xxie siècle : le care (soin), l’environnement et les identités subalternes. En excellent pédagogue, il nous entraîne sans difficulté dans ce qui fait l’intérêt de la philosophie politique : penser le monde qui nous entoure, en faire la critique sans tomber dans les schémas idéologiques dominants, élaborer un projet de société global sans sacrifier ce que les luttes de classe, de genre ou de race ont de singulier. Un livre important et édifiant. (ch)