Un entretien avec Marina Van Haeren
Comment s’organise l’assistance morale en Flandre et pour les néerlandophones de Bruxelles? Marina Van Haeren, directrice générale de deMens.nu, en dévoile les nombreuses déclinaisons.
Espace de Libertés: DeMens.nu a comme mission d’assurer l’assistance morale en Flandre. Dans quels domaines celle-ci s’exerce-t-elle?
Marian Van Haeren: L’assistance morale n’est qu’une petite partie de l’assistance humaniste et laïque que deMens.nu offre. Il est important de distinguer les deux types d’assistance morale, la générale et la catégorielle. L’assistance morale consiste en une aide individuelle pour toute personne qui se pose des questions existentielles ou ressentant le besoin d’une écoute objective, discrète, confidentielle et constructive dans un cadre laïque et humaniste.
L’assistance morale générale se dispense dans les 27 huizen van de mens (littéralement «maisons de l’être humain») implantées en Flandre et à Bruxelles et s’adresse à tout publique. Cette assistance morale peut être dispensée de façon très variée. Cela passe par l’information de la population sur des questions éthiques ou concernant la laïcité organisée et institutionnalisée ainsi que l’organisation d’activités visant à former et à renforcer la communauté laïque. Les huizen van de mens ainsi que les vrijzinnige ontmoetingscentra (équivalent des maisons de la laïcité francophones) forment une base solide permettant de développer le tissu associatif de la communauté laïque néerlandophone. Ces maisons, qui ont également une responsabilité importante en ce qui concerne le recrutement et la formation des volontaires, fournissent également toutes informations concernant les questions liées à une fin de vie en toute dignité. Les volontaires aident par exemple à remplir des formulaires de déclarations anticipés concernant les droits du patient, l’euthanasie, les dispositions funéraires. DeMens.nu propose également un accueil général et apporte son aide à l’organisation des différents types de cérémonies laïques, tels que les fêtes de naissances, les mariages, les cérémonies funéraires, les jubilés ou les fêtes de la jeunesse laïque.
En ce qui concerne l’assistance morale catégorielle, deMens.nu assiste ses organisations membres qui œuvrent dans une catégorie spécifique telle que l’assistance morale en milieu hospitalier et maisons de repos, dans les prisons, à l’armée et à l’aéroport de Bruxelles Zaventem.
Comment sont organisées les différentes instances qui proposent cette assistance?
À tous les niveaux, les conseillers moraux peuvent être des professionnels ou des volontaires. Dans les huizen van de mens, ils s’occupent des différentes tâches précitées. Dans le secteur des soins (hôpitaux et maison de repos), le Stuurgroep morele bijstand est responsable du recrutement et de la nomination des conseillers moraux. La Fondation pour l’assistance morale au détenus/Stichting voor morele bijstand aan gevangenen (FAMD/SMBG) est bicommunautaire, encadre les conseillers et s’occupe de l’assistance morale en milieu carcéral. À l’armée, c’est le Comité directeur qui organise et coordonne le Service d’assistance morale avec un cadre de professionnels. Les activités du conseiller moral de l’aéroport de Bruxelles Zaventem sont quant à elle coordonnées par le Centrale vrijzinnige raad/Conseil central laïque.
En quoi consiste exactement l’assistance morale, selon les différents domaines où elle s’exerce?
Tout le monde peut bénéficier d’une aide morale. Des professionnels ainsi que des volontaires dans tous les domaines cités sont disponibles pour une conversation confidentielle. On travaille sur base de valeurs humanistes. Tout le monde peut accéder à nos services. Des activités sont organisées pour les huizen van de mens et les vrijzinnige ontmoetingscentra afin de renforcer la communauté laïque et les associations membres du deMens.nu. Il est important que les membres de notre communauté puissent se rencontrer. Mais il est aussi important de rappeler que toute personne extérieure au mouvement peut pousser la porte d’un de ces lieux pour s’informer ou pour se faire aider.
Faites-vous appel à des personnes spécialisées?
Les conseillers moraux proposent une oreille attentive: ils écoutent les personnes mais ne pratiquent pas de thérapie. Si une personne a besoin d’une aide spécialisée, le conseiller moral va l’orienter vers le spécialiste adéquat en fonction de son problème (psychologue, psychiatre, avocat…).
Comment sont formés les conseillers moraux?
Le conseiller moral professionnel a une formation de niveau universitaire, master ou bachelier au minimum. Nous avons une grande diversité de diplômes. Les conseillers moraux ont l’esprit laïque et humaniste. Il existe néanmoins des formations universitaires spécifiques en science morale et éthique.
Disposez-vous d’un moyen d’évaluer les résultats obtenus?
Nous disposons d’un système de registration annuelle qui nous permet de les mesurer. Ce système est alimenté par les collègues des huizen van de mens. Pour l’année 2015, par exemple, nous avons rencontré 1 850 personnes, organisé 1 825 cérémonies et nous avons mené 9 500 consultations. Lors de ces consultations, 30% d’hommes et 70% de femmes ont fait appel à nos services. Les raisons des visites sont liées à des problèmes relationnels mais également à des problèmes de solitude, au décès d’un proche, à des questions éthiques et morales ou encore à des questions d’opinions philosophiques.
Quels sont vos objectifs pour l’avenir?
Nous voulons continuer à développer l’assistance morale avec l’accent laïque et humaniste et nous voulons investir dans le renforcement de la communauté laïque en Flandre et à Bruxelles.