Espace de libertés – Mai 2016

Ce n’est pas une prière mais un souhait


Édito

La laïcité, principe humaniste qui fonde le régime des libertés et des droits humains sur l’impartialité du pouvoir civil démocratique dégagé de toute ingérence religieuse, oblige l’État de droit à assurer l’égalité, la solidarité et l’émancipation des citoyens par la diffusion des savoirs et l’exercice du libre examen. Voici en quels termes l’assemblée générale du Centre d’Action Laïque a estimé pouvoir, ce 16 avril 2016, définir ou clarifier le concept de laïcité sans abdiquer pour autant la diversité et la spécificité de ses actions. Au rang de celles-ci, notamment, la défense d’une communauté non confessionnelle. Nous le voyons, si pour les laïques, aucun texte n’est sacré, ils montrent une fois de plus leur propre capacité à remettre les leurs en question.

Le 14 janvier 2015, à la suite de l’attentat au Musée juif de Bruxelles, notre Premier ministre convoquait les représentants des cultes et de l’action laïque à exprimer ensemble leur attachement à la démocratie, aux droits humains, aux libertés fondamentales (dont la liberté religieuse et d’expression), à l’égalité de l’homme et de la femme. Dans les grands moments d’émotion, il n’est donc pas rare de voir les chefs de culte s’associer à la société civile pour en proclamer publiquement les valeurs. Après les récents attentats de Paris et de Bruxelles, monsieur Michel invite les mêmes à déclarer solennellement défendre les libertés religieuse, d’expression et l’égalité de l’homme et de la femme. Ils préciseront sans doute une fois encore que les terroristes défendent une conception fausse de la religion. Certes. Mais l’émotion ne devrait-elle pas progressivement faire place à la lucidité et à l’exigence?

Que peut comprendre un citoyen catholique lorsque la loi canonique qui punit des peines les plus graves les «délits» d’apostasie et de blasphème n’est pas proposée à révision? Que peut comprendre un citoyen musulman lorsque le Coran, réputé incréé, parole de Dieu et donc ininterprétable, consacre plus de sourates et de versets à encourager le meurtre des polythéistes, des incroyants et des juifs qu’à vanter les vertus de la tolérance, de l’amour et de la paix? À expliquer que la femme fut créée soumise à l’homme par la volonté d’Allah? Le temps n’est-il pas venu pour nos chefs religieux de mieux habiter leurs propos et cesser de louer Janus, dieu romain qui regarde dans deux directions opposées?

À l’heure où la société civile comprend la nécessité urgente d’inscrire le principe de la laïcité dans notre Constitution, est-ce trop demander à nos amis chrétiens d’accepter d’adapter leur loi? Est-ce trop demander à nos amis musulmans de défendre le Coran comme une interprétation humaine de la parole de Dieu, et compatible avec nos valeurs plutôt que comme parole de Dieu, tout aussi légitime dans ses incitations au meurtre que dans sa promotion de l’amour universel? Puissent-ils également remettre l’ouvrage sur le métier. Ce n’est pas une prière mais un souhait.