Depuis la fin de ce mois de mai, des « experts » sont entendus à la commission de la Justice de la Chambre. Leur mission: éclairer nos députés sur l’opportunité ou non de voter l’une des six propositions de loi pour sortir définitivement l’IVG du Code pénal et en améliorer les conditions d’application.
Ce temps de l’écoute et de la réflexion est précieux. Après des mois d’attente, où la majorité semblait avant tout animée par la volonté de « jouer la montre », ces auditions permettent en effet de voir (enfin!) cette importante question de société bénéficier d’un début d’examen rationnel. Cependant, avant même d’analyser ces contributions, quelques constats peuvent déjà s’opérer après le vaudeville parlementaire de ces dernières semaines.
Près de trois décennies après la crise qui avait amené le roi Baudouin à être temporairement placé en incapacité de régner, en 2018, l’évocation de certains sujets semble toujours aussi compliquée pour une partie de nos responsables politiques. Attitude d’autant plus inacceptable qu’elle a pour effet, par le jeu des majorités, d’empêcher les députés de faire leur travail: soit, évoquer librement toutes les questions de société. Des logiques particratiques ne devraient pas pouvoir cadenasser un débat au sein de ce temple de la démocratie qu’est l’enceinte parlementaire.
N’oublions pas également que les opposants à l’IVG disposent encore de sérieux relais au sein de notre classe politique. Sans s’attarder sur la volte-face médiatique du cdH, l’obstination du CD&V ou les tergiversations de la N-VA, il est piquant de constater à quel point, lorsqu’il s’agit de vilipender les propositions déposées par ses collègues, une députée cdH utilise les mêmes outrances (des IVG qui se pratiqueraient soi-disant jusqu’au terme d’une grossesse!) et manipulations de langage que la porte-parole de la prétendue « marche pour la vie »…
Heureusement, les citoyens semblent plus mûrs que nos responsables politiques, comme l’atteste le sondage réalisé à notre demande par deux universités et qui indique clairement que la majorité de la population, toutes convictions confondues, est acquise à l’idée que l’IVG est un acte médical et n’a plus sa place dans le Code pénal.
Au-delà de futures péripéties parlementaires (il faudra bien voter un jour ou l’autre…), cette saga de la sortie de l’IVG du Code pénal doit aussi, plus globalement, nous faire réfléchir sur le sort réservé à l’ensemble des questions éthiques en Belgique. Rien n’est jamais acquis et le prix de nos libertés réside avant tout dans une vigilance perpétuelle.