Espace de libertés | Juin 2018 (n° 470)

Coup de pholie

À moins d’être l’Immaculée Conception, la vierge mère de Dieu ou la fille du prophète, toutes les femmes sont la perte de l’homme, la cause de sa chute, la source de ses faiblesses, l’origine de ses maux comme du Mal. Les hommes le savent bien:Satan l’habite. Depuis la tentatrice Ève avec son fruit défendu qui reste en travers de la gorge des mâles ou depuis la belle Pandore avec sa funeste boîte, la femme est une plaie, une gangrène, une calamité, un désastre ambulant, et de surcroît, si elle est bien plantée sur de jolies jambes, un constant appel à la débauche. A-t-elle seulement une âme?On se l’est demandé. N’est-elle pas née d’une vulgaire côtelette extraite de son maître et mari, l’Homme ? Que si !

Étant progressiste, je n’irai pas jusqu’à dire que c’est pour cela qu’il convient de l’infibuler, l’exciser, la voiler et la confiner dans sa cuisine ou son gynécée – quoique –, mais je clame qu’il est urgent de prendre une mesure de salut public en refusant de lui serrer la main, quelle impudeur ! Et en séparant hommes et femmes dans nos trams, autobus et omnibus, sans parler des salles de sport, des piscines et des écoles dont elles devraient être exclues. Car de toute évidence là n’est pas leur place, ainsi que le revendique le très éclairé parti Islam qui nous annonce l’imminence de la charia en Occident, c’est-à-dire l’avènement de temps heureux où chaque sexe sera enfin ou à nouveau à sa place. Mutatis mutandis, Aron Berger, le candidat juif ultra-orthodoxe qui fut pressenti pour être sur la liste anversoise du CD&V, tombe d’accord avec ledit parti Islam.

De l’islam à l’Islande, la quasi-homophonie induit en erreur car rien de plus différent que ces deux isla-là. Figurez-vous que les Islandais poussent leur fanatisme égalitariste jusqu’à se vanter d’aligner les salaires des femelles à ceux des hommes et de parader à la tête du classement du rapport du Forum économique mondial sur la parité. Certes, tous les Islandais, du moins je l’espère, ne partagent pas cette interprétation littéraliste de leurs sacro-saints droits de l’homme. Il n’empêche : Reykjavik refuse de reconnaître que la place d’une femme n’est pas à côté d’un homme dans les transports en commun et cela suffit pour que nous vouions ce repaire de Vikings aux gémonies. En tout cas, c’est décidé, moi je vote pour le parti éclairé qui va enfin mettre de l’ordre dans notre société pornographe où d’impudiques Walkyries dévoilées s’assoient à mes côtés dans le bus. Faut pas charrier. Laissez-moi vous rappeler que le mot «sexe» dérive, tels un « sécateur » ou une « secte », du verbe secare qui signifie « trancher, séparer » : par définition, les sexes doivent être séparés. Existe-t-il meilleure preuve qu’il est temps d’interdire tant la mixité que la parité et de boycotter l’Islande?