Dans tout ce qui est sorti ces dernières semaines à propos de Mai 68, il y a certes pas mal de radotages d’anciens combattants plus ou moins bien inspirés. Quelques pépites sortent cependant du lot, comme ce Mai 68 raconté par les objetsproposé par les éditions Couleur livres. Elles le précisent d’emblée:les quatre auteures n’ont pas «fait»Mai 68. Elles étaient trop jeunes à l’époque (ou peut-être même pas encore nées). Mais ce sont des historiennes qui avouent avoir parfois un peu de mal avec les querelles mémorielles que «l’événement 68»continue de générer aujourd’hui. On l’a déjà dit à maintes reprises, Mai 68 ne se réduit pas aux journées parisiennes, c’est un momentumqui dépasse largement le cadre français. Nos auteures insistent:Mai 68 est surtout une borne chronologique qui facilite la compréhension de cette période de basculement. Mais comment ne pas retomber dans le piège du monopole interprétatif, militant, nostalgique ou autre?Les auteures ont choisi le biais des objets de la vie quotidienne, ces «fragments de la vie matérielle qui forment un petit théâtre de l’ordinaire». Ce véritable dictionnaire à la Prévert propose des entrées aussi contrastées que la Deux-Chevaux, la toque en léopard du président Mobutu ou la guitare des groupes hippies… Des objets qui, autant que les faits et leurs interprétations, disent le corps social. D’une certaine manière, il s’agit ici d’entrer par le petit bout de la lorgnette dans l’univers mental de la génération qui a«fait»Mai 68 ou qui, en tout cas, en a entendu tellement parler qu’il en est devenu un élément clé de leur mémoire collective…
Des idées et des mots