Qu’y a-t-il en commun entre les « nouveaux talibans » et le Vlaams Belang ? Au minimum, une singulière propension à distiller mensonges et désinformation, avec un goût certain pour la mise en scène. Pendant que les uns scandent et tweetent qu’ils permettront aux femmes de travailler, les autres poussent à la délation envers « les profs, ces gauchistes ». Le deuxième point commun, nauséabond, réside dans cette attaque à la liberté de conscience et de pensée qui, si elle dévie de la norme érigée par ces fondamentalistes – ici la charia, là un programme d’extrême droite –, est vilipendée, avec un dédain affiché pour les principes démocratiques les plus élémentaires.
Pour les étudiantes de Kaboul, les portes des universités se referment en même temps que la pratique du sport et des activités professionnelles « trop en vue », alors que, dans nos universités, le cercle flamingant NSV, fréquenté par Tom depuis l’âge de 15 ans, on s’en souvient, ne craint pas le sexisme débridé et l’assignation des femmes à des rôles bien définis. Mais l’on peut aussi craindre les tentatives de mainmise sur les programmes, débats et opinions qui font la richesse de ces lieux de savoir si le parti extrémiste flamand devait atteindre le pouvoir. Tom Van Grieken l’affirmait sans détour en évoquant sa répulsion pour la rentrée scolaire voici un mois : « Mon dégoût a été exacerbé par les enseignants et les professeurs de gauche qui essaient d’incorporer leurs absurdités multiculturelles dans leurs cours en permanence. En 2024, nous allons présenter un projet de loi à tous ces enseignants gauchistes. » On ne peut pas dire que l’on n’aura pas été prévenu.e.s.
Troisième point commun entre ces intégristes : non, ils n’ont pas changé ! Si les jeunes nouveaux cadres du Vlaams Belang arborent des costumes de traders et ne lâchent pas leur smartphone d’un post, leurs idées et programmes fleurent toujours la « bête ». Et du côté des talibans, il n’aura pas fallu un mois pour comprendre que les femmes peuvent retourner à leurs fourneaux, éventuellement apporter le thé ou passer le balai dans les chefferies sans trébucher sur leur niqab, que les cours de musique n’auront plus lieu puisque l’académie a été détruite et que l’on peut compter sur la charia, un code juridique basé sur des coutumes d’un autre âge, pour guider le bon peuple.
Les sorties médiatiques de ces différents protagonistes ont eu lieu simultanément en septembre, d’où ce petit jeu des troublantes affinités. À ce stade, rangeons définitivement notre naïveté au placard, c’est une perte de temps. Il faut continuer à soutenir, sans dérogation aucune, les fondements de l’État de droit et les valeurs démocratiques. Il n’y a pas de recette miracle, mais l’école, l’université, l’éducation permanente, la presse libre demeurent nos principaux piliers à soutenir et à financer sans faille. L’extrémisme radical change rarement de peau.