Espace de libertés – Février 2017

L’opération «Cinéastes en classe» propose aux professeurs de l’enseignement fondamental, secondaire et supérieur d’inviter des cinéastes belges à venir parler de leur métier, voire à partager un projet de réalisation avec les élèves. Mais l’éducation au cinéma ne s’arrête pas là. Action!


Cette initiative part d’un constat simple: avec leurs horaires, les professeurs n’ont pas toujours la possibilité de se déplacer pour faire découvrir un film et un cinéaste en salle. «L’opération ne prétend pas apporter un savoir complet», détaille Alda Greoli, ministre de l’Enfance et de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles, «mais c’est en tout cas une occasion d’éveiller la curiosité de l’élève pour une cinématographie ou un métier qu’il ne connaît pas. L’animation est le plus souvent assurée par le professeur lui-même. Néanmoins, nous proposons aussi aux enseignants moins connaisseurs de s’appuyer sur les conseils d’opérateurs spécialisés. Pour bénéficier de ce service, il est demandé que les élèves aient vu au moins un film du cinéaste qu’ils auront à rencontrer», poursuit Alda Greoli.

Du tableau au grand écran

Cette nouvelle initiative, lancée à la fin du mois de septembre dernier à l’occasion du Festival international du film francophone de Namur, s’inscrit dans la série de nouvelles actions imaginées et mises en œuvre dans le cadre de la promotion et de diffusion du cinéma belge. Et prend bien entendu place dans une logique de complémentarité avec les autres opérations d’éducation aux médias soutenues par la FWB. Alda Greoli poursuit: «Je pense tout d’abord à “Écran large sur tableau noir”, visant à faire venir les élèves dans les salles de cinéma pour leur faire découvrir le cinéma sur grand écran. Je songe aussi au Prix des lycéens du cinéma belge francophone qui, une année sur deux, vise à attiser la curiosité des adolescents pour un cinéma qu’ils ne vont pas voir d’initiative…» Pour être complets, citons également diverses actions telles que les «Samedis du cinéma» à visée plus sociale avec des tarifs bas et un objectif intergénérationnel ou les activités de l’ASBL Loupiote, qui combine l’éducation au cinéma avec l’éducation par le cinéma.

Et puis, il faut également relever les salles de cinéma d’art et essai qui reçoivent une subvention couvrant toutes les activités scolaires d’éducation aux médias et au cinéma. Enfin, le passage d’un nombre croissant de salles au format numérique exerce aussi une influence positive sur l’éducation au cinéma, ou via le cinéma. Puisque, comme nous le confirme Jérôme Branders du cinéma Aventure à Bruxelles: «Maintenant, nous ne sommes plus tributaires des bobines qu’un distributeur nous confiait pour projeter le film, et nous retirait après. Avec le passage au digital, si nous payons les droits adéquats, nous pouvons télécharger n’importe quel film et le montrer à une classe, en fonction du thème que les élèves suivent durant leurs cours.»

Le cinéma, un mode d’expression à décrypter

Car enseigner l’analyse du langage cinématographique au sens large est essentiel! Exemple avec Frédéric Fonteyne, réalisateur, entre autres, de Tango Libre, La Femme de Gilles, ou Une liaison pornographique. «Apprendre à décrypter des films est important parce que le cinéma est un mode d’expression qui a une puissance gigantesque dans notre société, en particulier auprès des jeunes», explique-t-il. «Tout le monde n’a pas les mêmes chances. Il est important que l’école puisse donner l’occasion de découvrir un autre cinéma que celui du box-office, en particulier à ceux qui n’y auraient pas accès autrement! Je fais partie de ces élèves à qui l’école a fait découvrir la littérature, et cela a changé ma vie… Or le cinéma aussi est une porte qui s’ouvre sur des mondes que notre quotidien nous cache bien souvent…»

Reste à espérer que, en tête de gondole de cette éducation au septième art, «Cinéastes en classe», remplisse sa mission en touchant tous les types de publics, et pas uniquement les milieux et les établissements les plus favorisés. «Nous tirerons un premier bilan d’ici quelques mois», nous confirme la ministre. Pour voir si l’opération passera le cap de sa première édition, ou sera sanctionnée par un clap de fin.