Espace de libertés – Mars 2015

Édito

Nos papilles ont été victimes de dégoût, nos gorges se sont nouées, agressées par l’horreur, la révolte.

Pour d’aucuns, d’aucunes, on avait piétiné un espace privilégié de satire, de dérision, d’irrespect potache, de paroxysme subversif, bref un espace de liberté à consommer à volonté, avec modération ou à exclure de son régime médiatique, mais sans jamais en priver les autres.

Dans la foulée, on ciblait, on abattait des innocents en fonction de leur religion, de leur culture, mêlant terrorisme et antisémitisme.

Les foules se sont soulevées, des citoyens se sont mobilisés, se sentant poussés par une vague solidaire de volonté de dénoncer la barbarie, de se rassembler au-delà des différences, pour se sentir plus forts, plus justes, plus heureux ensemble.

Et là, en regardant dans le rétroviseur, à la marge de la foule compacte des gens de bonne foi, de bonne volonté, on a tout vu, on a tout entendu, de la théorie du complot, à «ils l’ont bien cherché», en passant par le refus de témoigner sa solidarité dans la dénonciation de la violence.

Les questions relatives aux extrémismes communautaires, à la radicalisation, sont mises en exergue, sont au cœur des médias, des débats. On tente de dépasser les mécanismes de rejet, d’opposition, d’isolement et de violence.

On ouvre les yeux sur des situations qui n’ont pas vu le jour le 7 janvier, mais qui ont été longtemps occultées, ignorées, minimisées, voire déformées. Des jeunes embrigadés, déboussolés, des écoles explosées, explosives, un encadrement déficient, la pauvreté, le manque, l’absence de perspectives, la ghettoïsation, un contexte mondial exacerbé par des violences qui, à force de s’accumuler, en deviennent cruellement banales. Tous ces ingrédients augmentent la pression et puis provoquent des explosions.

Comment réagir, que faire? Une série de mesures sont proposées. Déclaration commune, pacte d’excellence, déploiement des militaires, vigilance par rapport aux changements comportementaux, déchéance de nationalité, cours de citoyenneté pour tous.

Entre les bonnes intentions, les mauvaises intuitions, les contributions utiles et les cache-misères, il convient de privilégier toutes les initiatives qui rassemblent, qui permettent de dialoguer et, par ailleurs, de lutter, de condamner sans frilosité.

La tâche est immense, l’espoir devra gagner sur le découragement pour nous donner une chance d’être libres ensemble.