Espace de libertés – Février 2016

Atheist Republic, une communauté mondiale au credo humaniste


International
Au Canada, sondage après sondage, la religion chrétienne perd du terrain, au profit de l’athéisme. En 2005, 6 % des personnes sondées se considéraient comme athées convaincus. En 2012, ce pourcentage s’élevait à 9, selon le bureau de sondage WIN/Gallup International. Et en 2015, 12 % de Canadiens interrogés par le journal britannique The Telegraph se sont affirmés païens.

Certes, les croyants sont majoritaires dans ce pays qui s’étend d’un océan à l’autre, mais avec une population de seulement 35 millions; la religion désintéresse de plus en plus de monde. Ce phénomène est d’autant plus évident qu’une association – sans but lucratif – d’athées a vu le jour à Vancouver, en Colombie-Britannique. Depuis 2012, c’est toute une communauté internationale de plus d’un million de membres qui s’oppose aux croyances religieuses et dogmatiques qui «encouragent une certaine forme de violence et d’oppression».

Une république qui s’implique

Atheist Republic, comprenez la «République des athées», regroupe donc des non-croyants des quatre coins de la planète. Et souvent, les membres de cette communauté, qui ont eu foi en la religion, s’en sont détournés, à l’instar de la présidente-directrice générale de l’ASBL, Allie Jackson. «J’ai été élevée par des parents baptistes du sud des États-Unis. Une fois que je me suis mariée et que j’ai eu des enfants, j’ai été capable d’embrasser une vie d’amour, sans crainte de la religion. J’ai étudié la psychologie à l’université. […] Grâce à mon art et aux mots, j’espère aider les autres à trouver du réconfort dans un monde sans religion.»

La concurrence est rude à Toronto entre le religieux et le séculier. © Boatel/DianeUne différence ici-bas

Pour suivre ce dessein, l’ASBL s’est donnée comme mission de rassembler ceux et celles qui veulent contribuer à «réduire la misère et la souffrance» dans le monde. L’organisme véhicule des valeurs que prônent, selon lui, de nombreux athées, à savoir la paix, la justice et la liberté, de pensée et d’expression notamment. Des valeurs républicaines qui s’expriment lors de conférences et débats.

Atheist Republic compte dans ses rangs des convaincus d’un monde sans Dieu et son organisation fonctionne grâce à la contribution de chacun, qu’il s’agisse d’argent ou de temps. Pour son fondateur Armin Navabi, il est indéniable que les athées sont des individus qui se soucient des uns et des autres et que nombre d’entre eux aspirent à faire une différence ici-bas. Chacun peut plus facilement apporter sa pierre à l’édifice, car selon Armin Navabi, «les barrières de la communication se brisent, et notre Nouveau Monde, plus transparent, devient un environnement beaucoup plus détaché des religions et de leur emprise».

L’union fait la force

Son ambition était avant tout de présenter l’athéisme comme une alternative légitime à la religion.

À sa création, Atheist Républic ne se résumait qu’à une page Facebook. Son fondateur, un Canadien trentenaire d’origine iranienne, élevé selon les préceptes de l’islam et qui a abandonné toute croyance divine, s’est donné l’objectif de réunir le plus de gens possible. Loin de lui l’idée de les convaincre de l’inexistence de Dieu ou du caractère mensonger de la religion. Armin Navabi souhaitait tout simplement, selon ses partenaires, créer un espace de discussion où tout un chacun pourrait débattre de l’existence d’un être ou d’une force suprême à la tête du monde. Son ambition était avant tout de présenter l’athéisme comme une alternative légitime à la religion. Atheist Republic offre ainsi des espaces de rencontre aux non-croyants qui ont des idées et visions communes. Car l’organisme croit «que les athées peuvent fièrement se dresser contre tout jugement injuste qui accable si souvent les impies et païens». Cette communauté d’athées est convaincue aussi que la plupart des individus, qu’ils soient croyants, mécréants, agnostiques ou tout simplement spirituels, sont par nature aimants et pacifiques. La seule foi de son créateur: l’union d’un groupe de gens rationnels peut créer une force puissante qui, dès lors, ne peut être ignorée.

Nourrir l’esprit critique

L’organisme ne mâche pas ses mots quant à sa nature: «Nous sommes qui nous sommes et nous n’avons pas peur de le dire». Les administrateurs du médium social estiment qu’à l’heure actuelle, il y a encore très peu de personnes qui comprennent le concept même de l’athéisme et que cette méconnaissance en fait une doctrine vilipendée. Atheist Republic se positionne comme «l’une des rares organisations qui tentent d’aiguiller ceux qui s’affirment athées vers le questionnement et la recherche de réponses». Une méthodologie que l’ASBL estime condamnée et dénoncée par les religieux.

Au sein de cette communauté, les membres contributeurs opèrent comme des éducateurs: éduquer les personnes intéressées par l’athéisme «permettrait de leur ouvrir les yeux sur les attaques infondées à l’encontre de la doctrine» qu’ils ont choisie de suivre. Et pour que l’engagement de chacun reflète les aspirations de cette association virtuelle, celle-ci fournit des outils éducatifs qui vont d’une plateforme de discussion en ligne à des livres, en passant par des rencontres physiques. Le site web d’Atheist Republic se targue d’offrir des ressources qui non seulement apportent des réponses, mais qui aussi «enrichissent l’esprit».

Ne pas confondre athée et athéisme

Avec une page Facebook qui regroupe plus d’1,2 million de membres, Atheist Republic a donné naissance à un groupe privé du même nom. D’entrée de jeu, le ton est donné: «Ceci n’est pas un groupe pour les débats religieux. N’y souscrivez pas si vous croyez en un dieu quelconque! C’est un groupe d’athées et non sur l’athéisme.» Un club privé donc de douze administrateurs et avec une ligne de conduite composée de treize règles. Le groupe compte plus de 63 000 membres dans ses rangs. Allie Jackson et Armin Navabi, les deux figures de proue de l’athéisme à Vancouver, en Amérique du Nord et dans le monde anglo-saxon, ne s’efforcent pas à «prêcher pour leur chapelle». Les athées viennent à eux. Avec cette expansion du nombre de membres, Armin Navabi ne peut qu’être optimiste. «L’avenir d’Atheist Republic est brillant», souligne-t-il. Un futur qu’il envisage avec davantage de groupes et d’évènements pour que la «République des athées» soit encore plus accessible.