Espace de libertés | Mai 2018

À six mois des élections communales, les «belles»sorties médiatiques populistes débutent leur grotesque ballet. Car ne nous y trompons pas:il s’agit bien d’une forme de populisme supplémentaire qu’illustrent les propos des représentants du parti Islam. «Pas de femmes en tête de liste, des compartiments séparés dans les transports selon le sexe et l’instauration d’un État islamique en Belgique…»:ces positions discriminatoires soutenues par Redouane Ahrouch, le cofondateur du parti basé sur la charia, la loi islamique, suscitent évidemment, et à juste titre, la polémique. Avec une impression de déjà-vu provocateur et jusqu’au-boutiste, en vogue chez les populistes d’hier comme d’aujourd’hui. Mais au-delà de l’émoi et des railleries que l’on pourrait tenir sur le peu de représentativité de ce parti (deux élus à ce jour à Bruxelles), la consternation est au rendez-vous dans la majorité de la communauté musulmane, qui ne se reconnaît pas dans de tels propos et qui craint un énième retour de flammes sous forme de préjugés et de clichés consternants.

Du côté de la classe politique et des intellectuels, cela a aussi boosté la polémique, tant sur la nécessité de prévoir un cordon sanitaire autour des partis liberticides – le parti Islam peut finalement être associé à ceux d’extrême droite pour son appétence radicale – que sur l’éviction pure et simple de telles formations. Car actuellement, aussi choquantes soient de telles déclarations, elles ne sont pas illégales. Sauf que… comme l’épinglait Marc Uyttendaele, professeur de droit constitutionnel à l’ULB dans le journal L’Écho, le parti Islam nargue la démocratie et nos valeurs, en usant à souhait de notre chère liberté d’expression. Et le constitutionnaliste de rappeler que l’article 17 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme interdit cependant d’user d’une liberté reconnue par la Convention pour en détruire une autre.

Certains instruments juridiques pourraient-ils être réanimés pour endiguer ce type de discrimination envers des valeurs relevant directement des droits fondamentaux? Le professeur rappelle que l’Allemagne, traumatisée par le IIIeReich, a par exemple inscrit l’interdiction de partis politiques liberticides dans sa Constitution. Un point de vue intéressant s’il ne s’applique pas qu’à ce cas précis, mais également à d’autres formations extrémistes, qui portent elles aussi en leur sein des idées tout aussi violentes. Autre proposition: celle de Richard Miller et d’Olivier Maingain qui estimaient dans La Librequ’Islam fait de l’abus de droit et qu’il serait judicieux de reparler de l’inscription de la laïcité dans notre Constitution, ce qui permettrait si l’on va jusqu’au bout de cette démarche, de rappeler explicitement la primauté de la loi civile sur la loi religieuse. À gauche comme à droite, les voix s’élèvent donc pour condamner ce parti dont la méthode tristement classique, «diviser pour mieux régner», a trop souvent le vent en poupe. Et qu’il nous importe de combattre dignement.