La petite rengaine du verre à moitié plein vs. à moitié vide scinde l’espèce humaine en deux, à quelques paramètres près. Poussés dans le ravin par les mécaniques libérales, doctrinales, morales, nous expectorons que notre besoin de consolation est impossible à rassasier, nous revêtons des T-shirts en coton bio-équito-durablo-éthique arborant l’un ou l’autre adage fuckyouiste tel que « vivre est une maladie […]; la mort est le remède » (1). Hégésias, Schopenhauer, Cioran, les Sex Pistols et d’autres objecteurs de croissance sont des partisans acerbes d’une forme de pessimisme, tel un système de survie qui tend à maintenir la vigilance face au schéma totalitaire que l’optimisme inscrirait dans la pensée individuelle ET collective. Malgré les mouvements de type Tout autre chose qui invoquent des transitions écopolitiques, aucun cache-misère ne peut dissimuler les fondations lézardées, les pilastres érodés d’un temple du capital patriarco-ethno-centré. Malgré la volonté de puissance que chaque individu peut impliquer au service du monde, le fameux «être plus»nietzschéen radicalisé depuis trop de temps mute les égos en ogres à cigares vomissant du pétrodollar, de l’uranium, de l’égo à tire-larigot.
Alors que reste-t-il de nos amours?Peut-être la possibilité de ne plus nier l’effondrement, voire plonger dans celui-ci et analyser au dedans même de la mouise opaque, brute, globale, les systèmes qui ont mené la «civilisation»nommée thermo-industrielle – encore surnommée «adolescente»(alias pulsionnelle) – à sa perte. Déjà en 1972, Meadows et d’autres chercheurs du MIT, spécialistes de la modélisation systémique, publient The Limit to Growth. Leur estimation portait l’échéance de ce hic et nuncomni(im)potent à un siècle. En 2015, Pablo Servigne et Stevens, deux éminents collapsologues, s’appuient sur des chiffres anti-fake newsrecouvrant des études locales et mondiales. Ils annoncent une date de péremption endéans les 30 prochaines années. Dans plusieurs ouvrages, Naomi Klein dénonce notre modèle économique en guerre contre la vie sur Terre telle une crise existentielle. Elle soutient que le changement climatique est un appel au réveil civilisationnel, un message livré dans la langue des incendies, des inondations, des tempêtes et des sécheresses, multipliant des migrations, des famines, des guerres. Changer… ou disparaître!
Alors… verre à moitié plein => adrastia.org ou verre à moitié vide => goo.gl/Prdn8h?
(1) SR Nicolas de Chamfort (1740-1794)