Espace de libertés – Décembre 2015

Au-delà de la « guerre », la justice


Édito

Après les dramatiques événements survenus à Paris, et une fois passé le délai de décence au-delà duquel il est raisonnable d’émettre des commentaires, il me paraît utile, en tant que président du CAL, de faire la mise au point suivante.

En préambule, je sais, par expérience, qu’il est plus aisé de juger a posteriori que de décider à chaud. Qu’il me soit néanmoins permis, dès lors que les autorités françaises se complaisent à répéter que nous sommes en guerre, de ne pas partager cet avis.

Le terrorisme n’est pas la guerre. Il ne connaît aucun rituel, aucune règle et ne nécessite pas de raison. Il peut être unilatéral, ce que n’est jamais une guerre. Par cette prise de position, le pouvoir souhaite donc légitimer une réaction guerrière, la sienne. C’est pour- tant le dé auquel nos démocraties occidentales sont confrontées. Comment apporter une réponse autre que la guerre en réaction à des actes de terrorisme?

Je ne doute pas que des actions de police –fussent-elles de nature militaire– soient néces- saires pour sécuriser les populations, les biens et les modes de vie. Mais la guerre? Un antidote ou une èvre? Ne risque-t-elle pas d’emporter tous ceux qu’elle contamine? Et si l’on veut aller plus loin, comment dissocier cette notion du créneau commercial juteux de la vente d’armes, dont la France est l’un des principaux pourvoyeurs mon- diaux et la Wallonie l’un des fournisseurs de certains régimes peu recommandables?

Dans son communiqué du 16 novembre, le CAL a pris soin de mettre en garde les gouvernements et les entreprises qui, pour préserver leurs emplois, leur PIB et leurs pro ts, oublient toute éthique au point d’armer eux-mêmes la main qui les assassine. Que chacun balaie devant sa porte.

La laïcité apporte des réponses aux maux dont souffre notre société, en ce compris le radicalisme religieux dont les groupes terroristes se servent pour recruter leur chair à explosifs. Il nous appartient de les mettre en pratique.

Quant à la lutte armée contre les groupes terroristes, sans doute faudrait-il lancer un nouveau mot pour ne pas la désigner comme une guerre. À moins de la désigner par le juste mot qui sied au combat mené contre les criminels : j’ai nommé la justice. Dépouillée de tout sentiment de vengeance ou de châtiment, elle protège et répare, vise à réintégrer l’humain à l’humanité, assure le retour à la dignité et à la paix.