Espace de libertés | Septembre 2018 (n° 471)

L’antithèse de la mère parfaite


Des idées et des mots

Si vous offrez un livre à une femme qui vient d’avoir un bébé, elle risque bien de vous envoyer promener : « Tu crois que j’ai encore du temps (un cerveau disponible) pour lire ?! » D’ailleurs, l’auteure de ces lignes dut s’y reprendre à deux fois : la première, le livre ouvert sur la citation introductive fut aussitôt refermé pour répondre au besoin tonitruant du petit être remuant dans la pièce d’à côté ; la seconde fut la bonne. Et quelle lecture jubilatoire ! Amandine Dhée, « femme brouillon » et fière de l’être, parle à toutes les mères imparfaites qui se posent des questions, offrant un éclairage politique à cette expérience très intime qu’est la maternité. Avec sa volonté et ses tentatives, parfois vaines, de ne pas être écrasée par 2 000 ans d’histoire, de lutter contre le prétendu instinct maternel, contre les diktats de la société sur ce qu’une (future) mère de l’an 2018 devrait être/faire/penser ou pas, avec son désir de sortir des clichés sexistes qui planent sur son rôle, sur celui du père et sur la façon de s’occuper du bébé, avec ses doutes, ses contradictions aussi – ah ! le plaisir coupable de plier de la layette… et d’aimer ça –, l’écrivaine du Nord fait le tour de tout ce qui peut tarauder une post-parturiente. Un petit livre incisif et drôle à lire d’une traite quand bébé dort à poings fermés et un exutoire à offrir à toute jeune (et moins jeune) primipare… avec un peu d’insistance. Car «la mère parfaite fait partie des grands projets inutiles à dénoncer absolument». (ad)