Espace de libertés – Octobre 2015

Un entretien avec Joëlle Maison

En cette rentrée, l’école communale du Centre à Uccle est devenue à « rayonnement musical ». Coup de projecteur sur ce projet pédagogique innovateur et rencontre avec l’échevine de l’Enseignement, Joëlle Maison, également députée au Parlement de la Communauté française et membre de la commission « Éducation ».

Espace de Libertés: Comment est né le projet d’école à « rayonnement musical »?

Joëlle Maison: Les activités musicales, artistiques en général, demeurent encore l’un des parents pauvres du quotidien scolaire de nos enfants. Fortes de ce constat, nos écoles communales se sont engagées, voici quelques années, dans une réflexion approfondie sur les initiatives à mener pour donner aux activités culturelles et artistiques, plus particulièrement musicales, la place noble qui est la leur. D’initiatives simples en partenariats avec des acteurs culturels de qualité –tels la Monnaie, Bozar, ReMua et les Jeunesses musicales–, l’enthousiasme collectif de toute notre communauté scolaire (professionnels, enfants et parents compris) n’a cessé de croître.

Comment avez-vous été convaincue de l’intérêt d’introduire la musique dans le cursus des élèves?

On ne peut rester insensible aux multiples études mettant en exergue l’incidence des apprentissages musicaux sur les apprentissages scolaires et sociaux de l’enfant. La pratique musicale met en jeu des facultés telles que l’écoute, l’attention, la mémoire, l’imagination, le rythme et aussi la rigueur, le goût de l’effort, le respect des règles, des autres et de soi-même. Ces exigences se retrouvent dans les autres matières enseignées dans le cadre de l’éducation scolaire, et par extension dans le développement de la citoyenneté. Nous avons dès lors décidé d’inscrire la musique au programme de nos écoles communales et, pour cette rentrée, de mettre en œuvre à l’École du Centre un projet pédagogique global, le premier en Belgique, innovant et ambitieux. Ce projet est rendu possible par les liens avec l’Académie de musique d’Uccle.

En quoi les apprentissages musicaux peuvent-ils apporter un plus au niveau pédagogique?

La créativité est au centre de toutes les productions sonores et musicales. Ces dernières permettent à l’enfant de manifester sa créativité et de la développer tout en s’épanouissant, en affirmant sa personnalité et sa sensibilité, et en continuant à grandir et à apprendre en toute confiance. Dans un milieu scolaire privilégiant traditionnellement les intelligences verbo-linguistiques et logico-mathématiques, la pratique musicale peut également contribuer à un rééquilibrage des formes d’intelligence mobilisées. Cette situation, potentiellement plus gratifiante pour des enfants a priori moins performants dans les deux intelligences scolaires «traditionnelles», constituera un pas supplémentaire vers une école de la réussite.

Comment les élèves et puis leurs parents accueillent-ils le projet?

Le 1er septembre, j’ai passé la matinée à l’École du Centre afin d’y accueillir les parents et élèves. L’inspecteur pédagogique, le directeur de l’école, et moi-même, avons ensuite accompagné nos quatre musiciens-pédagogues dans toutes les classes, de la première maternelle à la sixième primaire. Les musiciens se sont livrés ensemble à une forme de présentation chantée et rythmique de leur rôle et de leur projet, qui a suscité beaucoup d’étonnement, d’intérêt et d’enthousiasme de la part des enfants et de l’équipe pédagogique, évidemment étroitement associée au projet. De la part des parents, nous n’avons, pour l’heure, reçu que des remerciements et félicitations.

Vous parlez plus haut de citoyenneté, est-ce que vous pensez que ce projet s’inscrit dans celui d’une éducation citoyenne?

Si ce projet s’inscrit pleinement dans une éducation à la citoyenneté, de par son contenu et son impact sur la cohésion du groupe, l’ouverture sur le monde et une meilleure valorisation de toutes les formes d’intelligence, l’éducation aux arts doit selon moi trouver ou retrouver une place pleine et entière dans le cursus scolaire obligatoire, en parfaite interdisciplinarité avec les apprentissages dits «fondamentaux». De même que je suis résolument favorable à un cours de deux heures de philosophie, de citoyenneté et d’histoire des religions, dès la première année primaire.