L’objectif prioritaire du Centre d’étude et de défense de l’école publique (CEDEP) est de réfléchir et de proposer les améliorations de notre système éducatif identifiées comme nécessaires pour mieux répondre à sa mission de base: conduire chaque élève au maximum de ses potentialités.
Le taux moyen de redoublement reste anormalement élevé et les enquêtes internationales les plus récentes confirment le niveau moyen anormalement bas des élèves de tous les réseaux de l’enseignement obligatoire. Tout ce qui a été tenté jusqu’ici n’y remédie que très partiellement, car c’est d’une véritable mutation dont notre système éducatif a besoin, tant au niveau de l’organisation que des mentalités ainsi que de la formation initiale et continuée des enseignants, afin de généraliser les bonnes pratiques pédagogiques.
L’enseignement obligatoire doit aussi avoir pour objectif de former des citoyens libres, autonomes et responsables, capables de contribuer à rendre la société plus juste et plus solidaire. Ceci ne peut se faire que dans le respect des convictions privées et des choix personnels de chacun, élèves, parents et enseignants, ce qui implique le respect des principes de la neutralité (1) déjà imposés dans les écoles officielles.
L’éducation philosophique et le droit des parents à ne pas divulguer leurs convictions
Depuis 2010, le CEDEP revendique la mise en place dans la grille horaire obligatoire d’un cours d’éducation philosophique, éthique et citoyenne enseigné à tous les élèves (2), et depuis 2012, demande que les cours de religion/morale actuels soient des options facultatives (3).
Dans son arrêt du 12 mars 2015, la Cour constitutionnelle a dit pour droit que l’obligation de fréquenter les cours de religion/morale actuels viole la Constitution et les droits de l’homme (4), en particulier le droit des parents « à ne pas divulguer leurs convictions religieuses ou philosophiques, qui relèvent avant tout du for intérieur de chacun ». Suite à cet arrêt, un décret, voté le 14 juillet dernier, instaure provisoirement un mécanisme de dispense automatique, sans motivation, et un encadrement pédagogique alternatif (EPA) pour les élèves dispensés, en attendant qu’un nouveau cours de philosophie et de citoyenneté soit mis en place pour tous les élèves.
Un second décret (en projet) vise à organiser ce nouveau cours pour septembre 2016 en primaire et septembre 2017 en secondaire, et à réduire les cours de religion/morale de deux périodes à une période par semaine. Selon ce projet de décret, l’élève qui choisit un cours de religion/morale bénéficierait d’une période de philosophie et citoyenneté, et l’élève dispensé de deux périodes.
Pour le CEDEP, aucune raison ne justifie cette nouvelle discrimination entre élèves, et il a demandé au Gouvernement et au Parlement que tous puissent bénéficier des deux périodes de philosophie et citoyenneté (5). Le CEDEP leur a également transmis un projet de référentiel pour le nouveau cours (6), élaboré en concertation avec ses 13 associations et un certain nombre d’experts, en vue de contribuer à sa mise en place dans les délais prévus.
Schéma illustrant la dynamique et l’interdépendance des compétences proposées
Une vision commune pour améliorer notre système éducatif
À plus long terme, les treize associations fédérées au sein du CEDEP proposent une réflexion commune et des recommandations pour réformer dans sa globalité et en profondeur notre système éducatif. Fruit d’un travail collectif, c’est un ensemble cohérent et indissociable qui seul permettra, pense le CEDEP, d’atteindre réellement, pour tous les élèves, les objectifs éducatifs dont un service public d’enseignement doit se doter aujourd’hui. Le principe de concurrence n’a guère de sens lorsqu’il s’agit d’élever tout enfant au maximum de ses potentialités quelle que soit son école. L’autonomie doit être la règle dans le choix des moyens pédagogiques les plus appropriés pour faire progresser tous les élèves, mais l’esprit de compétition et de sélection doit être remplacé par un esprit de coopération entre élèves, enseignants et écoles. La concurrence paralyse au lieu de stimuler. Ce qui stimule, ce sont les enfants. La réforme proposée par le CEDEP (7) vise à rassembler toutes les écoles financées par les budgets publics en un seul réseau public d’écoles autonomes, et s’exprime à travers dix-huit propositions réparties en trois thèmes:
- Réorienter: remplacer la peur de l’échec par la soif d’apprendre
- un enseignement adapté aux élèves,
- un dépistage précoce des difficultés,
- la suppression progressive du redoublement,
- une remédiation personnalisée,
- un soutien spécifique aux élèves qui maîtrisent insuffisamment le français,
- une évaluation positive,
- un véritable tronc commun jusqu’à la fin du 1er degré, prolongé progressivement jusqu’à la fin du 2e degré,
- un enseignement efficace d’une 2e langue,
- une valorisation de l’enseignement professionnel,
- Unifier: rassembler toutes les écoles dans un réseau unique de service public
- une gratuité totale,
- une large autonomie des écoles et des enseignants,
- un enseignement neutre,
- un réseau unifié de service public,
- des pouvoirs organisateurs élus,
- une vraie mixité sociale,
- Transformer: une formation de niveau universitaire pour tous les enseignants
- inciter les bonnes personnes à devenir enseignants,
- renforcer la formation pédagogique des enseignants,
- développer au maximum les potentialités de chaque élève.
Schéma proposé pour le réseau unique et publique d’écoles autonomes
(1) Les principes de la neutralité sont définis par les décrets du 31 mars 1994 et du 17 décembre 2003.
(2) CEDEP, Réflexions en vue d’un système éducatif plus performant pour tous les enfants, mars 2010.
(3) Cette demande du CEDEP a été rendue publique dans La Libre Belgique du 27 avril 2012.
(4) L’article 24 de la Constitution, combiné avec son article 19, et avec l’article 2 du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme.
(5) CEDEP, Pour un cours commun de 2 périodes par semaine d’éducation philosophique, éthique et citoyenne (EPEC), juin 2015.
(6) CEDEP, Projet d’un chapitre supplémentaire aux socles de compétences pour le cours d’éducation philosophique, éthique et citoyenne (EPEC), juin 2015, www.cedep.be
(7) CEDEP, Un réseau scolaire unique et public. Réflexions et recommandations en vue d’un système éducatif plus performant pour tous les enfants, février 2015.