Espace de libertés – Novembre 2016

Un petit dessin vaut mieux qu’un long discours


Droit de suite

« Un petit garçon est venu me voir tout à l’heure avec des crayons et du papier. Il m’a dit: “Je veux dessiner un homme en couleur, dis-moi comment le colorier.” » Qui ne se souviendrait pas des paroles de l’immortelle chanson interprétée par Hugues Aufray dans les années 1960? Mais, ici et maintenant, pour parler aux enfants du kaléidoscope de la multiculturalité, Renaud Erpicum et Cécile Bertrand ont choisi de partir des humeurs des ronchons de tout poil.

En quelques traits de couleur et en quelques mots, voilà nos préjugés les plus banals désossés, tournés en dérision et tranchés au scalpel. Le rouge de la colère, l’orange de la xénophobie, le jaune de la méfiance, le vert de l’intolérance, le bleu de la peur, l’indigo de l’indifférence, le violet de l’égoïsme: toutes ces attitudes bien humaines sont pointées (du nez, en l’occurrence) et ravalées au rayon des « sept péchés capitaux », sauce postmoderne. La conclusion est simple et ressemble d’ailleurs comme deux gouttes d’eau à celle de la chanson d’Hugues Aufray il y a cinquante ans: tendons les bras et sachons goûter la beauté de l’arc-en-ciel de la diversité des cultures. Des cultures et des langues, puisque toutes les parties écrites se trouvent répétées en sept différentes, du français au russe (?) en passant par l’arabe, l’italien, le turc, l’anglais et bien entendu le néerlandais. Mais, sans qu’on sache pourquoi, pas l’allemand ni l’espagnol. Ni d’ailleurs le wallon.

Bon, en tout cas, c’est avec un immense plaisir qu’on retrouve un autre registre des talents de la dessinatrice de presse bien connue Cécile Bertrand qui, avec une heureuse économie de moyens, brosse une ribambelle de petits bonhommes qui seraient bien rigolos s’ils n’étaient aussi bêtes et méchants.

Livre pour enfants, donc? Sûrement. Mais sans doute d’abord pour parents, éducateurs et… peut-être bien professeurs de CPC qui y trouveront à point nommé un outil pédagogique bien ficelé et, surtout, des plus politiquement corrects.