Espace de libertés – Septembre 2016

Apprendre les religions et la laïcité par le jeu


École
Baptisé «Kroiroupa», un nouveau jeu de société pédagogique propose aux participants de répondre à des questions sur les religions et la laïcité. Son but? Permettre aux élèves de parler de leurs (non-)croyances ou de découvrir celles des autres.

Le Centre d’éducation à la citoyenneté du Centre communautaire laïc juif David Susskind (CCLJ) mène depuis près de quinze ans, dans les écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles, tous réseaux confondus, un programme d’éducation à la citoyenneté intitulé «La haine, je dis NON!». Le principal but était d’amener les élèves à mieux se connaître afin que, valorisés dans leur(s) identité(s), ils aillent plus facilement à la rencontre de l’Autre.

Dans cette perspective, une animation autour des croyances et des convictions était mise sur pied et, chaque fois, le constat était le même: d’une part, les enfants montraient une profonde méconnaissance du sujet mais, d’autre part, ils témoignaient également d’un enthousiasme certain à évoquer leurs croyances et découvrir celles de leurs petits camarades. À l’école, la question de la croyance ou de la non-croyance reste souvent cantonnée aux cours dits philosophiques. À la lumière de cette expérience, il a semblé particulièrement judicieux de l’introduire dans la classe. C’est ainsi qu’est donc né Kroiroupa, un outil ludique qui permet à chacun de se retrouver dans la découverte des religions et de la laïcité: un jeu qui rassemble au lieu de diviser, en somme.

Se familiariser avec les croyances par le jeu

Point de départ: le christianisme, l’islam et le judaïsme, mais aussi le bouddhisme, l’hindouisme et le sikhisme; c’est-à-dire les religions les plus représentées en Belgique. Sans oublier, bien entendu, d’expliquer ce que sont la laïcité, l’athéisme et l’agnosticisme. Kroiroupa est un jeu coopératif basé sur le principe du memory doublé d’un quizz, avec des questions-réponses associées à chaque paire de cartes. Le déroulement du jeu permet d’explorer chaque croyance en fonction des étapes de la vie de l’être humain, mais aussi de repères tels que la personnalité des fondateurs, les interdits, les fêtes, etc. Deux paires de cartes sortent du lot: l’une donne des pistes à l’enseignant pour l’organisation d’un débat philosophique au sein de sa classe, tandis que l’autre questionne les liens existant entre les religions monothéistes. Avant la partie, les participants choisissent l’un des deux modules proposés: les religions monothéistes et la laïcité ou les religions d’origine indienne et la laïcité.

Les écoles en demande

Déjà testé auprès d’un certain nombre de classes de primaire, Kroiroupa rencontre un réel succès auprès des élèves et des enseignants. Notamment parce qu’il permet de parler de façon ludique d’une partie de l’identité de chacun. Fait significatif: lorsque Kroiroupa a été présenté au Salon de l’éducation de Charleroi, des professeurs de l’enseignement secondaire ont confirmé avoir besoin de ce nouvel outil. Mais Kroiroupa a été également testé auprès d’un public d’adolescents et d’adultes. Les parties de jeu furent tout aussi passionnantes qu’avec les plus jeunes. L’expérience prouve que ce jeu concerne un public de 10 à 120 ans.

Grâce au soutien de la COCOF, de la Fondation du judaïsme de Belgique et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, le jeu sera prochainement offert à toutes les écoles primaires et ludothèques bruxelloises. Le Centre interdisciplinaire d’étude des religions et de la laïcité (CIERL-ULB), l’Observatoire des religions et de la laïcité (ORELA-ULB) et le CEJI (Une contribution juive pour une Europe inclusive) ont également apporté leur collaboration à la concrétisation de Kroiroupa.

Ce qui est certain, c’est que ce jeu de mémoire œuvre au dialogue interculturel car, comme on le sait, seuls le dialogue et l’écoute peuvent amener un peu d’apaisement dans notre société bousculée par le phénomène religieux. «Kol Haolam Kulo», un chant traditionnel juif, dit que «le monde est un pont étroit, l’essentiel est de ne pas avoir peur de le traverser». Kroiroupa est sûrement un premier pas dans cette direction.