Depuis plus de dix ans, le CAL/Luxembourg s’implique dans la question des assuétudes à travers deux approches de promotion de la santé: la prévention et la réduction des risques. Mais comment ces approches se mettent-elles en place sur le terrain? À quoi le CAL/Luxembourg est-il scotché?
Les Potados, AlTaCaMu, Bogota Trip, Boule de Neige… Tous ces termes étranges sont les noms des animations scolaires et des services que le CAL/Luxembourg propose aux jeunes et aux adultes en matière d’assuétudes. Depuis une décennie, en effet, la régionale travaille la problématique des assuétudes à travers deux axes distincts, mais qui s’inscrivent dans un continuum: la prévention et la réduction des risques. Si la prévention vise à diminuer l’incidence de l’usage de drogues dans la population, la réduction des risques, quant à elle, a pour but de prévenir les dommages que l’usage de drogues peut occasionner chez les personnes qui ne peuvent ou qui ne veulent pas s’abstenir d’en consommer (1).
Le CAL/Luxembourg est agréé depuis le 1er janvier 2014 par la Région wallonne comme Service d’aide et de soins spécialisés en assuétudes.
Agir en prévention des assuétudes
La prévention des assuétudes s’adresse aux pré-adolescents et aux adolescents qui pourraient être amenés à faire leurs premières expériences de consommation. La méthode classique de prévention tend à créer un sentiment de peur par rapport aux transgressions des normes morales et légales et à l’usage des produits. Or, on le sait, ce discours est contre-productif. C’est pourquoi le CAL/Luxembourg travaille, dans une perspective de promotion de la santé, l’ouverture d’esprit, l’esprit critique et la lutte contre les conditionnements, la capacité de faire des choix et de trouver des soutiens dans l’entourage, tout en abordant la question du plaisir, centrale dans les premières consommations. Une information sur les drogues est proposée aux parents des pré-adolescents avant l’animation. Elle vise à remettre en question les représentations véhiculées sur les drogues et leurs usages, à dédramatiser la première consommation sans pour autant la banaliser, tout en rappelant la nécessité d’entrer dans un dialogue avec les enfants dès leur entrée dans l’adolescence.
Et l’adolescence, parlons-en justement! Avec ses premières expériences, les envies de transgression… et le regard souvent stigmatisant des adultes. La prévention passe alors par la discussion et l’information qui permettent de mesurer ses choix, de construire sa propre réflexion et de déterminer ses limites. Sur ce sujet, la formation des multiplicateurs est déterminante: elle passe par la rencontre des futurs travailleurs sociaux et enseignants en se centrant sur les représentations et le nécessaire dialogue sur ces questions que ce soit avec les jeunes, avec M. et Mme Tout-le-Monde ou encore avec les usagers de drogues, et cela sans tabou ni préjugé.
La réduction des risques: un plus à la santé
Le CAL/Luxembourg, agréé depuis le 1er janvier 2014 par la Région wallonne comme Service d’aide et de soins spécialisés en assuétudes, a rassemblé sous un seul label (Drugs’care Infos-Services) ses projets de réduction des risques destinés aux consommateurs. Les usagers et leurs proches y trouvent conseils et informations sur les produits et leurs usages ainsi que, sur demande, une réorientation vers des services de soins.
Les opérations Boule de Neige (apprentissage par les pairs avec un effet «boule de neige», les consommateurs devenant les «passeurs» d’informations) se déclinent selon les publics en Boule de Neige «Alcool» diffusé plutôt auprès des jeunes adultes, Boule de Neige «Rue» et Boule de Neige «Prison». S’adressant aux consommateurs, ces opérations visent un apprentissage de «bonnes pratiques». Une sensibilisation des médecins généralistes est menée en parallèle.
Drugs’Care Infos-Services assure, en matière de consommation récréative, l’organisation d’action de réduction des risques lors d’évènements festifs et l’implantation du label Quality Nights dans les discothèques et salles de concert de la province. Ce label garantit des services de promotion de la santé dans les lieux festifs engagés dans ce projet (eau gratuite, bouchons d’oreille, préservatifs, informations sur la santé…). Drugs’Care Infos-Services a également ouvert un comptoir d’échange de seringues pour les usagers de drogues dans le sud de la province.
Construire des ponts
Fort de son expertise, le CAL/Luxembourg est allé voir ce qui se passait chez ses voisins en s’impliquant dans deux projets européens financés par le fonds FEDER. Le dernier en date: «MAG-Net 2: réduction des risques à destination du public à consommation récréative de drogues dans la Grande Région et sensibilisation des professionnels de la santé». Quatre axes ont été privilégiés: le recueil de nouvelles données sur la consommation récréative, l’édition d’un livret de référence à destination des médecins, la sensibilisation du personnel médical et paramédical via des formations et des journées d’échanges et enfin une campagne de sensibilisation ouvrant le dialogue entre les médecins et les usagers sur la consommation récréative de drogues.
Au-delà de ces activités ancrées dans le quotidien, la régionale défend également les usagers de drogues et une certaine manière d’envisager la société dans les coordinations en prenant des positions fortes pour que restent au cœur du débat les questions d’émancipation, de liberté, de plaisir et pour freiner les tentations de contrôle et répressives. Liberté individuelle, émancipation, dignité et citoyenneté valent aussi pour les usagers de drogues trop souvent culpabilisés, instrumentalisés et finalement laissés pour compte lorsqu’ils échouent à atteindre le but qui leur est assigné, c’est-à-dire guérir.
(1) Extrait de la Charte de réduction des risques élaborée sur l’initiative de Modus Vivendi ASBL. Cf. reductiondesrisques.be