Espace de libertés | Juin 2014 (n° 430)

Lors de ma prise de fonction à la présidence du Centre d’Action Laïque, j’ai évoqué la jeunesse comme l’un des axes prioritaires de nos réflexions et de notre action.

D’aucuns objecteront qu’il s’agit là d’un serpent de mer qui, tout comme celui que les Écossais appellent familièrement Nessie, ne se montre qu’au sein d’un brouillard épais. Je lance pourtant le défi de lever cette brume saumâtre et d’insuffler clairement l’idée que le monstre redouté est un humanoïde aux idées fraîches et stimulantes.

Parler des jeunes, tout le monde le fait. Parler aux jeunes, c’est nettement plus délicat. Et d’ailleurs, de quels jeunes s’agit-il ? Des enfants ? Des ados ? Des pré-adultes ? Des jeunes adultes ? Des prépensionnés ? Chacune de ces catégories est habitée par des préoccupations propres, des espérances particulières. Chacune nourrit ses inquiétudes et se singularise par un langage. Et le constat peut être fait : personne n’attend de la laïcité qu’elle améliore significativement son quotidien ou ses perspectives d’avenir.

Serait-ce le fruit d’une erreur d’appréciation, voire de communication, que de n’avoir pu donner à ces « jeunes », en plus de 40 ans d’existence, l’envie de mieux nous connaître à défaut de celle de nous rejoindre ?

Interrogeons-nous : que pourrions-nous dire aux « jeunes », toutes catégories confondues, pour qu’ils changent d’idée à l’égard de la laïcité ou au moins, qu’ils prennent conscience de ce qu’elle existe et qu’elle se bat pour leurs libertés ? Car enfin, c’est cela que nous proposons : une société laïque qui, notamment, garantisse aux individus d’être respectés dans leurs différences
de quelque nature qu’elles soient. Une société qui n’impose pas d’idéologie, ne favorise aucune religion et permette l’émancipation de chacun par la pratique du libre examen et le partage des connaissances. Une société de citoyens égaux et incommodes, une société « tous admis » dans laquelle aucun groupe humain n’exige d’avantages sur les autres. Une société solidaire, protectrice du plus faible, qui respecte les règles du vivre ensemble en toute impartialité.

« Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement. […] » Je nous engage à faire nôtre ce précepte. Pas dans une vulgaire démarche prosélyte ou communautariste, non ! Dans une démarche laïque (du grec laos, peuple) et rationnelle qui propose aux générations futures une société de paix et de compréhension mutuelle. Une société qui fasse de la laïcité, plutôt que des antagonismes et des guerres, le véritable moteur de l’histoire. Qui relève le gant ?