Voilà qui est fait! Après avoir limogé des milliers de fonctionnaires, juges, artistes ou universitaires et emprisonné les journalistes qui ont le malheur d’exercer leur métier, le gouvernement islamo-conservateur turc se penche à présent sur le développement de la pensée et des connaissances de sa jeunesse. Un nouveau programme scolaire a été mis sur pied pour la rentrée, avec plusieurs nouveautés. La première: le djihad fera désormais partie des concepts enseignés. Non, pas celui qui fait si peur aux Occidentaux. « Le bon djihadî » a précisé le ministre de l’Éducation nationale, Ismet Yilmaz: « Pas celui de la guerre sainte, mais de l’amour de la patrie.« Nous voilà rassurés!
Côté patrie, une petite couche supplémentaire sera ajoutée, reléguant la posture et l’historique leadership d’Atatürk au second plan (le kémalisme étant par ailleurs qualifié « d’accident de l’histoire »), face au véritable événement historique d’envergure: le putsch raté du 15 juillet 2016. On vous le disait d’emblée: nous y voilà! Mais ce n’est pas tout.
Côté sciences, la théorie de l’évolution darwinienne est elle aussi évincée. Faute de « pertinence et parce qu’elle dépasse le niveau de compréhension des élèves« , a expliqué le ministre de l’Éducation. Le principe de laïcité énoncé dans la Constitution en est réduit à peau de chagrin. Chaque fois plus de lycées laïques sont transformés en écoles pour imams. Quant à la direction des affaires religieuses (la Diyanet, qui forme par ailleurs les imams turcs de Belgique), elle est montée en grade, avec un nombre de fonctionnaires désormais supérieur à celui du ministère de l’Intérieur, elle possède sa propre TV et une ligne verte qui prodigue des conseils sur l’observance de la norme islamique pour des questions relevant du quotidien. Toujours dans les écoles: depuis peu, un local doit être réservé à la prière, mais surtout, seul l’islam sunnite a le droit de cité, alors que quelque 18 millions de Turcs sont, notamment, de confession alévie. Suite au prochain épisode.