C’est un sacré pavé que le MR a lancé dans la mare en recommandant, mi-mars, à la commission d’enquête parlementaire sur les attentats terroristes d’interdire les financements “venus de l’étranger” pour les cultes. Cette sortie musclée faisait suite à l’audition controversée du directeur du Centre islamique et culturel de Belgique, notamment quant à son financement qui provient de la Ligue islamique mondiale et, donc, de l’Arabie saoudite.
Ce n’était pourtant pas un scoop, il y a longtemps que ces liens sont établis. Il y a longtemps également que l’on sait que divers États, Maroc et Turquie en tête, entendent encadrer et contrôler “leurs” communautés respectives présentes en Belgique. Pour mémoire, en 2010, la Sûreté de l’État soulignait déjà l’ingérence de “puissances étrangères”, mais aussi celle d’un “groupement turc radical”, dans les structures de l’islam institutionnel de Belgique.
Or, les pouvoirs publics belges oscillent depuis toujours entre deux attitudes contradictoires: dans certains cas, le respect du principe de neutralité est brandi pour justifier l’inaction mais, dans d’autres cas, les mêmes se livrent sans vergogne à des immiscions directes, singulièrement dans l’organisation du culte musulman. Parfois, certains de nos responsables politiques ont été tentés de sous-traiter la structuration (et donc le financement et la surveillance) des musulmans de Belgique à des États étrangers; à d’autres moments, ils ont appuyé la consolidation d’un véritable islam belge. Parfois, ils se sont commis avec des milieux religieux douteux, parfois ils ont dégainé à tout va et flingué tout ce qui bougeait.
Pour le dire plus simplement: ils n’ont jamais vraiment su à quel saint se vouer dans ce grand méli-mélo cultuel et ça ne date pas d’hier. Au XIXe siècle déjà, les “libéraux” de l’époque – mais ce terme recouvrait une autre réalité qu’aujourd’hui – se méfiaient de l’activisme de Rome et notamment de l’argent que le Saint-Siège était supposé déverser à flots sur les catholiques de Belgique…
Ces vieilles peurs illustrent une question qui, elle, est toujours bien d’actualité: il est indispensable de clarifier le principe qui guide les relations entre les pouvoirs publics et les sphères convictionnelles, quelles qu’elles soient. Et ce principe porte un nom: c’est la laïcité de l’État. Ce principe protégera les croyants comme ceux qui ne le sont pas. Il n’a rien de “français” et ne date pas du XVIIIe siècle ni de 1905, il est universel et intemporel. Et, croyez-le, nous en reparlerons.